Les 8 indispensables du numéro 77

BOULE

Appareil Volant Imitant l’Oiseau Naturel

(CHOLBIZ / L’Autre Distribution)

Avec ce second album, Cédrik Boule réussit son coup, assène ses vérités, décapantes et détonantes. On embarque avec bonheur dans cet AVION (Appareil Volant Imitant l’Oiseau Naturel) piloté par ce drôle d’olibrius, auteur-compositeur à la plume alerte et parfois acerbe. En clown blanc d’une chanson réaliste, en observateur-poète ludique et lucide de notre monde, Boule chante l’air du temps comme le temps qui passe, lançant au passage de belles oeillades au monde de l’enfance. Pour l’épauler dans ce second round discographique, à la réalisation, c’est Robin Leduc et Cyrus Hordé, qui s’y collent, collaborateurs notamment de l’incontournable Gauvain Sers et de Revolver. L’incursion vocale des chanteuses Lucrèce Sassella et Jeannette Rochette, respectivement sur deux titres, apporte et renforce le charme indéniable de ce bel AVION.

www.appareil-volant.fr

Fabrice Bérard


FÉLICIEN LIA

Des feux des fous

(Chaptel Records)

Quelle claque ! C’est la première expression qui vient à la fin de l’écoute de ce quatrième album du Suisse Félicien Lia, Des feux des fous. Un disque qui nous touche profondément pour la richesse des musiques, où l’on retrouve un fond de groove, du rock psyché, mais aussi des influences jazz. On entend du Pink Floyd, du Bashung, du Cure, du Georges Benson aussi… Au final, c’est du Félicien Lia, bien entouré par une équipe de musiciens solides et décomplexés, capables de tout, en nous faisant pénétrer dans un univers rappelant la bande originale d’un film des années 70. Nul besoin d’utiliser des machines pour faire sonner ce disque, mais des claviers, guitares, banjo, tambourin, saxo… Lia, c’est aussi une voix suave, sensuelle, qui se fond dans ce decorum musical, une voix au service d’une poésie sombre et imagée, observant la folie (extra)ordinaire. Une pépite.

www.felicienlia.com

Stéphanie Berrebi


LE BALLUCHE DE LA SAUGRENUE

Tone of musette

(La Saugrenue)

Ils existent depuis 2006 et ne cessent de se familiariser avec un son actuel tout en gardant un pied dans les années 30. Fidèles à eux-mêmes, les cinq membres mélangent encore les genres et les époques, mais semblent davantage s’ouvrir au monde. Ponctuant leurs morceaux de rythmiques reggae (L’ostrogoth), afro (L’horloger) ou latino (Accroche-cœur), ils passent de la chanson française traditionnelle à l’électroswing dans une ambiance populaire. Chantant aussi en arabe (Folies berbères) et en russe (Sputnik), Sacha la Fauve entretient son rôle d’enchanteresse en nous hypnotisant grâce à sa voix sensuelle. À ses côtés, les musiciens usent d’autant de folie que de talent pour nous faire guincher. Entre bal musette du futur et cabaret déjanté, ce groupe n’a aucune limite : certains artistes nous font hocher la tête, d’autres nous la vident, Le Balluche quant à lui, nous la fait carrément perdre…

www.leballuche.com

Nicolas Claude


MELBA

Cœur combattant

(Diva Machine)

Après avoir remporté le tremplin d’À Thou Bout d’Chant à Lyon en 2015, Melba a travaillé patiemment pour sortir Cœur combattant, son premier EP. C’est en Amazone qu’elle chante maintenant, une véritable combattante, mais quand elle se bat, ça n’est « jamais contre les hommes, contre les idées » seulement. Elle se chante Ronde, car « si je suis aussi ronde, c’est que j’ai mangé trop d’hommes ». Dans Machine de guerre, Melba se découvre sans pudeur avec l’amant. Elle sait se faire énigmatique avec Céleste, une femme aux « yeux verts dans les vagues vides ». Et tendre dans la nostalgie d’un lointain voyage Jusqu’à la mer. Melba est une interprète pleine de ressources avec une grande voix aux multiples tonalités dont elle use avec talent. Nicolas Steib et Bonetrips ont réalisé ce disque en lui donnant une couleur electro-pop en adéquation avec la voix et les textes de Melba. Un EP époustouflant.

www.facebook.com/melba.la.vraie

Yves Le Pape


TARSIUS

Avancer

(Fo Feo Productions)

Très vite, Tarsius séduit par ses airs prenants et un style riche et varié, flirtant avec le funk et le blues dans un esprit rock. Un groupe inclassable, avec un sens de la mélodie développé, qui nous emmène faire un tour des musiques du monde accompagnées par une section cuivre talentueuse et des percussions exotiques. Les morceaux rodés sur scène arrivent à nous émouvoir (Fuel the rocket), comme à nous faire danser sur des airs d’afro beat (Use it move it do it). Take the first train semble tout droit sortir de la discographie d’Herman Düne, alors que Le rouge au front et Achète du sexe pourraient tout à fait être des oeuvres des Négresses Vertes. Les textes, chantés par la voix légèrement pincée de Yannick Walet, expriment un optimisme de la vie (Avancer contre le vent) avec des situations quelquefois romanticosexy (Le vaudou love). La diversification de sa musique fait son originalité et la qualité d’un album à découvrir.

www.tarsiusmusic.com

Franck Dufil


ANGLE MORT & CLIGNOTANT

Code pin

(Atypeek Music)

« C’est quoi ce son ? Curieux phénomène. » Cet extrait du titre Sur la piste de danse des Orléanais d’Angle Mort & Clignotant reflète la fraîcheur distillée par ce nouvel EP. Huit titres qui foncent à toute allure sur une double voie, celle du hip-hop et de l’électro, à destination d’un nouvel univers musical pour la langue française. On aime l’insouciance et le panache des deux chanteurs aux voix juvéniles, sans prise de tête, loin du nombrilisme de la trap contemporaine. Mêlant plaisir et insouciance, AM&C nous hypnotise (Code pin), ambiance le dance-floor (Sur la piste de danse) et nous balade sur L’Autoroute du plaisir. Leur version tropicale hallucinée de Chenille est faite pour perdre la tête. L’atmosphère plus dark de Piscine ou Sunny met un coup de frein à l’ensemble, mais Parfois c’est beau, auréolé de la présence de Cadillac de Stupeflip, les installe en tête de gondole des artistes à suivre.

www.facebook.com/anglemortetclignotant

Benjamin Valentie


SLY JOHNSON

Silvère

(Just Looking Productions)

Membre fondateur du Saïan Supa Crew, le chanteur, beatboxeur, instrumentiste et compositeur Sly Johnson nous offre un troisième album solo. Un opus personnel et intimiste qu’il a baptisé de son vrai prénom, Silvère. Accompagné du producteur Ben Molinaro, Sly Johnson nous propose un voyage musical allant de la soul au hip-hop, en passant par le funk et le jazz. Beaucoup de recherches musicales électroniques, d’expérimentations et d’innovations pour un album qui a tout de même su garder un aspect organique. Adoubé par le trompettiste Erik Truffaz, influencé notamment par l’Anglais James Blake et la griffe de Faada Freddy dans le style et le flow, l’ex-Saïan fait figure de locomotive dans un style trop peu présent dans le paysage musical. Un univers sonore et un parcours de vie à découvrir avant, en 2020, un futur projet autour des textes de Boris Vian, autre artiste pluridisciplinaire en avance sur son temps…

https://slyjohnson.net

Grégory Couvert


PACCOUD & LE SISTER SYSTEM

Le grand tout

(Le Furieux)

Quand même ! Il est sacrément réussi le dernier CD signé Paccoud & Sister, riche de dix-sept titres chantés avec grâce, orchestrés avec bonne mesure. Voilà de la chanson signifiante, qui n’exclut ni poésie, ni rythme, ni humour. De la chanson française interprétée avec cœur, chœur, talent. L’écriture revient en majeure partie à Paccoud qui ne mâche pas ses mots pour nous attendrir en énonçant quelques vérités sociétales. Ça fait des bébés est un titre magnifique que nous avions auparavant entendu de la voix d’Elena Josse, Sister de son état. Armelle Dumoulin signe trois titres dont Tout ce bleu de son dernier CD. Son duo avec Paccoud sur Matin trouvé est magique. Elle chante Le cimetière des trains de Leprest nous laissant sur une voie (voix) de ferraille de circonstance. Le disque est impressionnant d’harmonie et d’intensité, dans ce système-là, on aime le live, on aime le disque.

www.christian-paccoud.com

Annie Claire