Les 8 indispensables du FrancoFans 51


NOUVEL R

Les yeux de la foule

(Yotanka)

Après Tout va bien, le groupe de hip-hop angevin revient avec un troisième opus dans lequel le texte semble avoir repris le dessus sur la musique. Tout en servant parfaitement le propos, l’accompagnement musical se montre plus mélodique, toujours percutant mais sans aucune agressivité. Comme dans leurs deux premiers albums, Nouvel R s’inspire de la société pour démontrer l’enfermement progressif de la nature humaine actuelle. À ne plus chercher à connaître ou comprendre son propre voisin, l’homme a perdu en simplicité et en humanité : voilà sans doute le constat général de ce nouveau disque qui pousse adroitement à la réflexion (Raccourcis, Torche humaine). Un peu à part, le morceau Cueillir des mûres dévoile une facette plus intime et captive par sa sincérité dans la narration. Le flow et la complémentarité des deux MCs nous rappellent IAM mais Nouvel R a aujourd’hui clairement imposé un son personnel.

www.nouvelr-officiel.com

Nicolas Claude


DARAN

Le monde perdu

(Washi Washa)

Daran prend enfin la liberté d’enregistrer un album qui lui tenait à coeur depuis de nombreuses années. Accompagné seulement de sa guitare et de quelques notes d’harmonica, il nous fait partager un moment intime. Comme une heure passée à ses côtés, on l’écoute nous raconter la vie et les gens. Proche de la maquette, l’émotion des mots et de la voix nous fait oublier les arrangements minimalistes. Écrits essentiellement par son fidèle ami Pierre-Yves Lebert, les textes parlent de l’humain et des problèmes que lui inflige la société. Que se soient le regard des autres (Gens du voyage), le licenciement (Le bal des poulets), la déception et le découragement (Le monde perdu) ou encore une déclaration d’amour (Une sorte d’église), les mots et la voix profonde de Daran nous touchent obligatoirement. Des chansons relativement sombres mais pleines d’espoirs qui seront illustrées par une dessinatrice, en direct sur scène durant la nouvelle tournée.

www.daran.ca

Franck Dufil


FABIEN BOEUF

Dans les cordes

(JABA)

Fabien Boeuf est de ces artistes qui se nourrissent de rencontres et de partages. Il en avait fait un album, Boeuf avec les autres, et il revient aujourd’hui nous présenter Dans les cordes, son nouvel opus. Le résultat d’une rencontre entre musiciens venant d’horizons divers, puis d’un travail de création collectif, présenté d’abord sur scène. Le résultat est plutôt probant quand on sait combien il est difficile de trouver l’équilibre entre instruments électriques et acoustiques. Violon, violoncelle, basse, guitares acoustique et électrique, beatbox ont su s’imbriquer, combiner leurs harmonies pour délivrer des mélodies rock, folk ou pop selon les humeurs inspirées par les textes. L’interprétation de Fabien est sensible, grave ou légère, mais toujours sincère, et nous offre des moments d’exception : Prenons la peine, Sur le fil, Demain les anges... Dans les cordes, écrin d’un artiste serein et mature.

www.fabienboeuf.com

Sandrine Palinckx


SALE PETIT BONHOMME

À ma guise

(Collectif Gonzo)

Le collectif Sale Petit Bonhomme, réuni autour de Jean-Jacques et Aurélien Mouzac, nous offre À ma guise, un quatrième opus doux et agréable. Les chansons sont principalement arrangées pour guitare, saxophone et accordina, un instrument original qui est un mix entre l’accordéon dont il reprend les touches et l’harmonica, dont il reprend environ la forme et la manière d’en jouer. Une orchestration originale et des textes eux, qui abordent entre autres, des thèmes éternels, comme L’amour, premier titre qui ouvre l’album. L’amour sous toutes ses formes : l’amour adultère, l’amour impatient, l’amour sensuel, l’amour soumis, l’amour charnel, l’amour plus fort que la folie et la bêtise des hommes ? (L’amour perd patience voilà qu’il prend la mouche / À peine on le caresse il vous met sur la touche). Un disque qu’on écoute et réécoute, avec plaisir, à votre guise...

www.salepetitbonhomme.com

Laure Boulaud


LIZ CHERHAL

Les survivantes

(Kalmia Productions / L’Autre Distribution)

Depuis son premier album, il est arrivé quelque chose à Liz Cherhal qui revient avec Les survivantes. Réalisé par Morvan Prat, cet album plus abouti s’éloigne d’une chanson française classique en osant des instrumentations plus pop. Le projet ne s’arrête pas à un recueil de chansons mais l’album est cohérent et entier par la forme comme par le fond. Les lignes de chant et les mélodies sont accrocheuses et nous invitent à rentrer dans les histoires. Liz Cherhal aborde joliment avec pudeur les urgences et les nuances des sentiments amoureux ou familiaux et plus particulièrement ceux de l’amour filial. Elle remercie Anne Sylvestre et Michèle Bernard, et ce n’est pas pour rien puisqu’on ressent l’influence de ces deux grandes artistes dans son travail (Pour jouer avec maman, J’ai déchiré la page...), on pense aussi à l’univers de Jeanne Plante. On sourit à l’écoute des chansons Tu m’épates et de son hommage à la chanson d’amour Je t’aime d’amour qui vaut le détour...

www.lizcherhal.com

Hélène Lachambre


EVELYNE GALLET

Nuits blanches avec un hibou sage

(Auto-produit)

« Ah quel beau pays la France / Paradis de libre expression / Où l’on peut dire ce que l’on pense / À quelques rares exceptions », comme les vers des Gens, écrits par Mathieu Côte trop vite disparu, résonnent aujourd’hui différemment. Évelyne qui nous a tant fait rire sur Infidèle nous surprend à nous émouvoir plus souvent qu’à son tour, chantant un vieil amour déchu, comparant les cabines d’essayage aux confessionnaux, contant la romance d’un épouvantail et d’une hirondelle. À la justesse des mots de Mathieu, de Stéphane Balmino et de Patrick Font, s’ajoutent l’interprétation sur le fil d’Évelyne, un violon, un accordéon et le piano de Jeanne Garraud. Parce que le rire n’est jamais loin, elle s’amuse aussi à comprendre les punks (« Si jamais on le prive de bière / Combien de temps il reste en vie ? ») et la fatigue de la jeune maman, loin de la félicité que l’on nous avait promise. Évelyne n’a toujours pas rangé sa verve dans sa poche.

www.evelynegallet.com

Audrey Lavallade


DES FOURMIS DANS LES MAINS

Partout des gens

(Label Folie)

Ancré dans la réalité et totalement délirant, ce quatrième opus des Fourmis nous en met plein les oreilles et le coeur, avec ses cascades de mots et de notes projetées : ordre et désordre chez les humains ; la nature honorée, poésie martelée sur des lances instrumentales (basse, contrebasse, guitarcelle, piano et batterie). La spécificité musicale fascine comme une machine infernale, lente qui avance vers l’ivresse : échos de cordes, résonances de voix. Dans cet univers particulier, le réel s’entrechoque avec l’imaginaire, comme dans la tête des gens, enfants, marins, vieux, Partout des gens qui rêvent. L’album raconte des êtres bien incarnés, des joues, des mains, des dos, des reins et puis des mensonges, des torrents d’amour et des tempêtes de larmes. Ils sont trois qui chantent et jouent : Laurent Fellot, Camille Durieux et Corentin Quemener. Ils annoncent un autre album à venir, on jubile.

www.desfourmisdanslesmains.com

Annie Claire


CRICK ZACHARY

Rodéo

(Auto-produit)

Ce second opus s’inscrit dans un registre double : il joue à la fois sur un registre très rock, guitares acérées à l’appui mais aussi sur un autre très tendre où l’on regarde, un rien mélancolique, les années qui ont filé. La meilleure illustration en serait ces deux titres : le très offensif Rodé qui ouvre l’album - avec la participation de Mell - et le très émouvant 22h40 avec les choeurs rayonnants de Cat. Réalisé par Louis Ville, qu’on connaît bien pour ses nombreux albums en tant que chanteur, ce disque imprime une certaine poésie avec, à la clef, une très belle voix qui porte un texte souvent pertinent. On sent l’influence bienveillante et bienvenue de Renaud et souvent cette espèce de nostalgie que l’on ressent dans Zdislaw Baltazar. Sous des cieux oniriques ou électriques, on goûte cet album très réussi, comme encore avec Tiens-toi bien. On quitte à regret l’univers de Crick Zachary, peut-être avec la promesse de le voir sur scène.

www.crickzachary.com

Florence Marek