Les 8 indispensables du FrancoFans 45


BATLIK

Mauvais sentiments

(À Brûle Pourpoint)

Neuvième album pour cet artiste qui fêtera ses dix ans de scène à la fin de l’année. Malgré la cadence annuelle de ses sorties, l’Albertivillarien arrive à se renouveler à chaque fois. Les musiques sont toujours plus intenses, grâce notamment à son batteur à l’aise dans tous les styles et à la présence des choeurs de Lisa Portelli et d’Anastasia. Si on connaissait déjà le ton cru de Batlik, celui-ci arrive encore à nous déconcerter. Les mauvais sentiments de l’homme sont incarnés dans des textes chantés pour la plupart à la première personne. Il y a une brutalité dans cette manière d’explorer l’humain, dans ce qu’il a de plus vil et dans sa relation à l’autre. Du Désir de vengeance abject, aux amitiés fragiles ou intéressées, de la société de consommation qui nous ronge (Les persuadés) aux dirigeants AAA « assassins par procuration », la vision de l’homme n’est pas belle mais malheureusement réaliste. Un album saisissant, du grand Batlik !

www.abrulepourpoint.com

Stéphanie Berrebi


NOSFELL

Amour massif

(Likadé / Scherzo Productions)

Retrouver Labyala Fela Da Jawid Fel (Nosfell pour les intimes) pour un cinquième opus est un signe, un bon signe. Preuve qu’il est encore possible d’exister hors des clairières. Preuve qu’il est bon d’affranchir la langue française, l’exprimer avec un corps dansant, la marier avec une néo-langue. Sans concession, Nosfell nous envoie donc une décharge d’Amour massif, chantée en anglais, en klokobetz (langue imaginaire d’inspiration germano-japonaise) mais également en français, langue ré-apprivoisée depuis sa collaboration avec LE chorégraphe Philippe Decouflé. La voix haut perchée, puisant dans le folk et le blues, le multi-instrumentiste se fait aider dans l’écriture par Dominique A(né) et Dick Annegarn dans trois des plus réussis morceaux de ce disque, aux accents plus easy-listening que les précédents. Une galette qui a des allures de faire-part pour aller voir Nosfell sur les planches ; là, l’oiseau nu et tatoué déploie ses bras, sa voix et explose.

www.nosfell.com

Arnold Faivre


HK

Les Déserteurs

(Blue Line / PIAS)

Dans l’idée d’HK, Les Déserteurs, c’est un café imaginaire à Alger dans lequel se rencontreraient tous les Grands de la chanson : Brassens, Brel et Ferré forcément, mais aussi Vian, Renaud ou Nougaro, tous assis autour d’un thé à la menthe. Dans ce lieu se ferait la rencontre entre les chansons populaires de France et la musique traditionnelle algérienne, le chaâbi. Une double culture à l’image de celle de HK, enfant d’immigrés algériens. Pour ce nouveau projet, il délaisse ses Saltimbanks au profit d’un orchestre de musique chaâbi et garde la même énergie et le même engagement, avec une ligne directrice identique : construire un monde plus humain. Il fallait avoir les épaules pour se confronter à Vesoul, Toulouse ou L’affiche rouge mais HK, dès les premières heures du MAP, avait déjà montré cet amour de la chanson en reprenant Amsterdam. En interprétant ces morceaux intemporels et en y ajoutant une touche de poésie venue d’ailleurs, HK ouvre les frontières musicales du patrimoine français.

www.saltimbanks.fr

Audrey Lavallade


MERZHIN

Des heures à la seconde

(Adrenaline Prod / L’Autre Distribution)

Après avoir fêté ses quinze ans, Merzhin revient cette fois avec un son plus rock alternatif, autour de la thématique de l’humain. Dès la première chanson, le ton est donné sur Je suis un homme. Les riffs sont énervés, les guitares résonnent de plus belle et la bombarde est toujours si entraînante. Avec ces différentes textures, Merzhin nous prouve que ses ressources musicales sont toujours aussi denses. Dans ces douze titres, se dessine une galerie de portraits d’hommes, allant de l’indigné à l’homme contemplatif. La notion du temps qui passe, elle, est aussi abordée avec l’envoûtante chanson Des heures vagabondes. Il en ressort des compositions à la mécanique bien huilée qui galvanisent (Dans ma peau, Welcome circus) ou des ballades poétiques à souhait (Ligne d’horizon). Le duo avec Manu, ex-Dolly, sur L’éclaireur est des plus détonnants. La magie opère et voici un nouveau coup d’enclume dans la discographie de Merzhin !

http://merzhin.net

Quentin Hingrand


LISE MARTIN

Déments songes

(Auto-produit)

Lise Martin, la « désenchanteresse », ouvre grand les fenêtres de la dualité de l’amour, au cours d’une ballade folk mélancolique qui nous emporte aux combats des solitudes d’une vie, de l’absence et de la tristesse. Elle est la flamme d’une bougie portée aux méandres d’un fleuve qui résiste à toute tempête. Chansonnière généreuse, elle nous transmet ce premier album (double) Déments songes / Par don, d’une écriture poétique où chaque chanson, comme des gouttes d’eau, forme des rivières, des sources et des ruisseaux bordés de larmes scintillantes, dans lesquelles se fond au dedans toute sa vérité. Sa voix ample et profonde trouve une belle harmonie avec la composition musicale du quatuor jazz acoustique, créant un atmosphère épurée de conte moderne aux airs de guitare folk, percussions, violoncelle, violon, harmonica et banjo. Il y a le coeur au ventre, l’esprit de Joan Baez, un siècle de chanson française, dans la gorge de Lise Martin.

www.noomiz.com/LiseMartin

Zef Cervantes


SIDILARSEN

Chatterbox

(New Track Music / Musicast)

Dix ans après leur premier disque, Sidilarsen revient avec un album électro-rock fort en gueule. Ce qui saute de suite aux oreilles, ce sont les voix bourrées d’effets, la puissance de chaque titre, les textes engagés, mais parfois obscurs. On commence avec Comme on vibre, dont les riffs mécaniques vont marteler vos enceintes. Matières premières, tout aussi entraînant, traite de la casse sociale et de la raison productiviste... titre très actuel, rageur et bien pensé, sans doute l’hymne syndical de la prochaine manif. On en veut encore nous hurle l’amour, L’ivresse des maudits, est plus torturé. Nos anciens sort indéniablement du lot, dans un registre rap hip-hop très réussi. On finit avec Plus près de la flamme, une version de Fan sauce Sidilarsen et Des milliards, titre « hypersocial », révolte des masses contre un ordre établi imparfait. Chatterbox, un disque « coup de boule » !

www.sidilarsen.com

Matthias Swierzewski


PARIS COMBO

5

(Ta-Dah Music)

Toujours emmené par l’excellente et pétillante Belle du Berry, le combo parisien nous propose son cinquième album studio sobrement intitulé 5. Depuis l’album Motifs en 2004, les fans attendaient le retour du groupe et de sa musique si facilement reconnaissable et appréciée jusqu’aux États-Unis. Élégant mélange de musique rétro des années 30, de jazz, de musique latino ou encore d’influences tziganes et orientales, la recette Paris Combo fonctionne toujours à merveille et nous régale. Les trouvailles mélodiques portées par la voix de Belle du Berry nous replongent à nouveau immanquablement dans l’univers sonore et musical du groupe. Côté texte, on parle beaucoup d’amour bien sûr, d’histoires ratées (Goodbye Pinocchio), de nostalgie (Chaque fois), d’attente (Les cailloux blancs), de déception (Morphée)... Paris Combo ne vieillit pas, se bonifie et reste fidèle au « son » qui a fait son succès. Une référence.

www.pariscombo.com

Grégory Couvert


K !

Entre mes jambes

(Auto-produit)

Il y a bien longtemps qu’on n’avait goûté à un album doué d’une telle originalité. Tant le texte que la musique évoquent les riches heures du surréalisme. Chantées parfois en allemand, certaines chansons comme Kensington Park ne sont pas sans rappeler l’oeuvre de Kurt Weil et de son célèbre Opéra de quat’sous. Délibérément drôle, la chanteuse s’amuse et le macabre La femme en boîte provoque un rire jubilatoire. Les thèmes prennent en défaut les hommes et l’amour par trop candides, les mots s’avèrent jetés crûment dans un bouquet de cynisme salvateur avec notamment Entre mes jambes, le titre choisi pour ce brillant EP. L’assommoir sous forme de chanson plus douce n’en est pas moins acérée, comme une noyade doucereuse dans un lac d’absinthe. Parallèlement, la chanteuse se produit avec bonheur sur scène, son spectacle reflète la même particularité que ce disque que l’on découvre avec plaisir.

www.k-officiel.com

Florence Marek